IRAN-TAN-PLAN

 

Parcours de 3 semaines, effectué en octobre / novembre 2003

 

     Le RECIT DU VOYAGE

 

►        Les PHOTOS :   Shiraz             

Persépolis         

Yazd                  

Kerman & Bam

                                      Abyaneh & Kashan   

Esfahan, Ghom & Téhéran

Diverses

 

►        Les INFOS PRATIQUES

 

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texte de présentation

 

COMMENT PEUT-ON AVOIR LES YEUX PERSANS ?

 

Avec un shah siamois, pardi !

Ces propos ont été écrits bien avant que l’autre tordu théologico-réactionnaire ait été élu. Cela dit, cet épiphénomène (ce « détail », comme dirait un de ses semblables franco-chauvin) n’altère pas nécessairement le jugement à long terme. Les ringards peuvent séduire les foules le temps d’une législature, rarement plus (Hitler ayant été une douloureuse exception).

Pays en lente mutation, sûre mais semée d’embûches : la Révolution Islamique a quoi qu’il en soit représenté un moment exceptionnel pour une population méprisée par son Shah, et Khomeiny reste une figure mythique, symbole même de cette libération, au même titre que les grands généraux de la guerre contre l’Irak. Mais aujourd’hui, l’Iran a quelque chose de trop moderne pour que les gens continuent d’accepter que leur vie soit en permanence régentée par une poignée de vieilles barbes – et cela, même si la majorité de la population reste fortement croyante. Il suffit de se rendre à une mosquée, et j’ai vu peu de pays musulmans où la présence féminine soit si importante dans les lieux de prière, imposant bien évidemment la division de ces salles par des cloisons. On ne va pas mélanger les torchons et les serviettes, et Allah n’accepte pas la mixité de ses créations. Enfin, quoique dans le cadre de la perpétuation de l’espèce…

 

L’autre surprise est de voir toutes ces femelles encagoulées (en fait, non : juste les cheveux couverts) avec parfois un portable à l’oreille, voire au volant, et, pire, conduisant alors qu’un homme est en passager ! Ne me dites quand même pas que la femme a une âme. Je suis prêt à écouter n’importe quoi, mais là, quand même… D’autres se baladent, un livre scientifique en anglais dépassant négligeamment de leur sac. Et elles savent lire, en plus ! Satan est partout. Et à propos de tchador, au moins dans les grandes villes, il est de plus en plus fréquent de croiser des femmes avec des vêtements stricts mais aux couleurs pimpantes, tranchant avec l’habituel noir, voire un fichu multicolore sur les cheveux. Ces diablesses sont prêtes à tout pour détourner l’honnête homme du droit chemin.

 

En fait, même si cela serre un peu le cœur de voir toutes ses femmes dans leurs tenues le plus souvent peu gracieuses (sac à patate noir cachant toutes ces formes impures, propres à exciter le mâle ensorcelé par ces sirènes), on est loin des visages couverts des intégristes de Hama (Syrie), ou du Xinjiang (Chine), voire de quelques provocateurs intégristes d’Istanbul comme j’en ai vus. L’intégrisme est visiblement peu en odeur de sainteté en Iran, les gens n’en veulent plus.

 

L’impression du voyageur ? De se retrouver plus dans le prolongement de la Turquie (celle des grands centres urbains) que dans l’antichambre du Pakistan. L’islam de tous les jours n’y a plus rien de très violent, les imams sont en train de rentrer dans leurs casernes, contre leur gré. La persistance de l’agressivité des Etats Unis contre ce pays ne peut s’expliquer que par leurs ambitions géo-pétrolo-stratégiques : entre l’Afghanistan et l’Irak, l’Iran ferait bien au tableau de chasse du futur Petrol Empire USA Co.

 

L’impression du cyclo-voyageur ? Population chaleureuse, même si elle commence à s’habituer désormais à la présence d’Etrangers sur les principaux axes. Pour autant, deux fois j’ai été victime de blagues de mauvais goût de jeunes : le vol de casquette à la moto. Exercice d’habileté pour le voleur, sans grand risque pour eux : la première fois, vers Shiraz, ça s’est bien passé, et ils m’ont même fait rendre la casquette quelques kilomètres plus loin. La deuxième fois, à Esfahan, ils ont failli tout bonnement m’assommer et me faire chuter, en plein milieu d’un carrefour circulant, et ne m’ont pas rendu la casquette. Bon, c’est plutôt rare.

 

La sécurité est normalement bonne dans ce pays. Je tape cela, en même temps que je prends connaissance des dernières infos CCI, et notamment de Géraldine & Romain Claret, concernant l’enlèvement de trois cyclos près de la frontière. Côté Turquie ou côté Pakistan ? Il faut savoir que tout l’est est une zone pas toujours sûre, et qu’on m’a recommandé de ne pas y camper (ce que j’ai fait une nuit, mais très très loin de la frontière), ou alors près de postes de police. Des contrebandiers en tous genre y règnent, tout un tas de petits trafics, et l’enlèvement d’occidentaux ne serait pas surprenant. C’est la seule zone du pays, avec ses immenses territoires désertiques, qui soit mal tenue par le gouvernement central – surtout qu’il débouche sur le Pakistan, notamment sur le Balouchistan, les zones tribales, et tout le sud : autant de zones que le gouvernement d’Islamabad ne tient absolument pas.

 

Côté paysage, malgré l’aspect apparemment montagneux révélé par les cartes géographiques, songez plutôt aux déserts US et leurs espaces infinis : le plus souvent, les routes restent en fond de très larges vallées ou traversant des déserts. La plupart du temps, les parcours sont relativement monotones, incitant à kilométrer un max’ (je tournais régulièrement à 100 km minimum par jour, moi qui ne fait généralement plus guère de 50 km). C’est la direction et le sens du vent qui fait toute la différence. Mais celui-ci est trop variable, d’un jour sur l’autre, voire d’une heure à l’autre, pour tenter de donner des tuyaux. Entre l’influence de l’ouest, celle du Golfe, et celle des déserts, il y a trop de paramètres pour prédire le sens du vent dans deux ou trois heures.

 

Il existe quelques belles routes, probablement en approchant la Mer Caspienne, et enfin surtout en sortant des axes principaux. Ainsi, entre Esfahan et Kashan, la route d’accès à Abyaneh est superbe, ainsi que la piste qui continue au-delà, rattrapant une haute route redescendant ensuite sur Kashan. Je suppose qu’on doit aussi trouver de belles routes dans le Kordistan.

 

Côté villes, de belles choses : Esfahan bien sûr, mais aussi Shiraz, à la rigueur Kashan (un peu survalorisé par le Lonely, à mon sens), Yazd, Kerman. Evidemment, surtout les mosquées, ces fameuses décorations à la manière de l’Asie Centrale. Mais il y a aussi ces sites superbes que sont Persepolis, et surtout la citadelle de Bam, dans l’est du pays : elle vaut largement le détour, même deuis Esfahan. Et il est surprenant de voir une ville très ancienne comme Yazd, dont le centre est en cours de restauration, avec même quelques squares proprets.

 

Par contre, Téhéran ne représente absolument aucun intérêt, à part pour les adorateurs des musées, et comme point de départ des routes vers le nord (Caspienne) : immense métropole, de peut-être 15 millions d’habitants, aussi polluée que Mexico, trafic démentiel et axes saturés (aux heures de pointe, les motos envahissent les trottoirs, sans grand respect des piétons). Sauf si besoin d’un visa, on peut parfaitement éviter la capitale (j’ai croisé un couple cyclo ayant coupé de Tabriz à Esfahan via Hamadan). Des bus permettent de bypasser la capitale (Tabriz-Esfahan, etc…).

 

Si dans ces paysages infinis vous en avez un peu marre de rouler, il est très facile de prendre un bus confortable (« volvo »), pour un prix ridicule, même s’il faut le plus souvent négocier pour le vélo (il m’est arrivé qu’on me demande 5 $ pour le vélo, quand le passage pour moi revenait à guère plus d’1 $ !). Pour prendre un exemple, le bus Téhéran-Istanbul, 2500 km, 36 à 40 h, coûte 25 $ ! On m’a demandé 10 $ pour le vélo, devant le niveau des prix pratiqués je n’ai pas eu le courage de marchander. En général, je négociais un droit pour le vélo représentant entre le tiers et la moitié du prix pour le passager, il me semble que chacun y trouve son compte.

 

Le système de bus est calqué sur celui des bus turcs : confortables, fréquents, concurrence acharnée dont le cycliste peut souvent jouer pour embarquer aisément son vélo. Par contre, oubliez les trains : tout semble être fait pour décourager quelqu’un montant en cours de route avec des bagages à enregistrer. Ainsi, à Kerman, alors que la gare est à 8 km du centre, en pleine cambrousse, il faut retourner en ville pour acheter un billet ! Et le temps de revenir à la gare, le service à bagages est fermé, alors que le train passe bien plus tard ! Il y avait peut-être là-dessous une arnaque avec les taxis, mais cette organsation courtelinesque ne m’étonnerait même pas.

 

Pour ma part, disposant de guère plus de 3 semaines, je m’en suis tenu au parcours suivant : bus frontière turc-Téhéran, puis bus Téhéran-Shiraz, enfin à vélo Shiraz-Yazd (le vent violent m’ayant détourné de Esfahan !), puis bus Yazd-Kerman (vers l’est), puis à vélo Kerman-Bam (parcours relativement intéressant), puis bus Bam-Kerman-Esfahan, puis à vélo Esfahan-Kashan-Ghom-Téhéran. Soit bien plus de bus que de vélo, mais vu les distances et la difficulté à obtenir des visas supérieurs à un mois, très rares sont les cyclistes qui ont parcouru l’Iran uniquement à bord de leur engin. Ou alors, il s’agit d’une traversée réalisée le plus vite possible, au plus court, et surtout sans s’arrêter vraiment dans les villes.

 

Il semble désormais aisé d’avoir un visa : soit en France, soit en Turquie. A Ankara, il m’a fallu attendre 1 semaine, coût 50 $. Si vous disposez au préalable du visa pakistanais (ou autre pays frontalier : Azerbaïdjan, Turkmenistan…), vous pouvez demander un visa de transit, 30 $ et surtout délivré le jour même.

 

Le ramadan n’y pose aucun problème, sauf pour se restaurer en ville (mais toutes les épiceries restent ouvertes normalement, même dans le moindre village). Le long de la route, les gargottes restent ouvertes, et les chauffeurs de camion et de bus ne se privent pas de manger et boire, ni les passagers (contrairement en Libye par exemple). Et je pense qu’il existe un esprit suffisamment tolérant (au moins dans les villes) pour ne pas vous reprocher de manger ou boire en public – mais le respect du visiteur impose de rester discret.

 

Pour sa popote : on trouve partout des recharges de gaz butane, modèle classique 190 g, pour moitié prix qu’en France. Soit quincailleries, soit magasins de chasse / pêche. Ne pas trop compter trouver du bon matériel vélo, mais dans toute ville d’une certaine importance, on trouvera quand même le basique : pneus, chambres, cables…Pour camper, on arrive souvent à trouver des coins un peu discrets, évidemment moins facile le long de routes traversant les déserts – mais on déniche. L’eau est fiable partout : je n’ai jamais traité l’eau, et jamais je n’ai eu de problème intestinaux. Pas de problème de palu, sauf peut-être l’été le long du Golfe ? Bref, dans l’ensemble, c’est un pays sain, en apparence bien organisé. Pas de bidonvilles, même si ce n’est pas très riche, et les villes ont toujours de jolis petit parcs bien agencés, de façon relativement moderne.

 

Le réseau routier est plus que satisfaisant : les double voies à chaussées séparées n’y sont pas rares, les revêtements sont bons, il y a souvent une bande utilisable pour les cyclistes. Heureusement, car le trafic est démentiel. Le prix de l’essence est ridiculement bas (1 FF le litre, si j’ai bon souvenir – ah oui, pour nos auditeurs de moins de 77 ans d’âge, je veux dire 0,15 euro), incitant au trafic automobile. Paradoxalement, dans un pays où l’Etat est fort, et avec un réseau de bus interurbain très bien fait, le réseau urbain de bus est minable, et tout se fait à coup de taxis, le plus souvent officieux. Conséquence : en permanence, vous avez des voitures qui s’arrêtent pile poil devant vous, pour racler un client. A la longue, c’est irritant.

 

Sinon, bien qu’il y ait très peu de vélos en circulation et bien que le réseau soit conçu pour le trafic rapide (rares feux rouges, échangeurs, voies de droite se rabattant), les automobilistes sont dans l’ensemble respectueux envers les cyclistes. Mais un casque sur le museau rassure tout de même, notamment sur des routes étroites et circulantes, notamment à l’est de Kerman. De même, quand une autoroute double la route nationale, prenez-là : l’autoroute a une bande d’arrêt d’urgence et un trafic de véhicules légers (+ bus), tandis que la nationale est souvent très étroite, et recueille la quasi-totalité du trafic de camions et semi-remorques. En général, le personnel des péages vous laisse passer. L’autoroute Téhéran-Esfahan est en cours de construction au sud de Kashan.

 

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