CYCLOTIN ET LE
RETOUR DE LA REVANCHE DE CYMRU
Llanfairpwllgwyngyllgogeryschwyrndrobwllllantysiliogogogoch : si vous ne dites
pas ça d’un coup d’œil d’un seul, c’est que vous n’êtes pas bon pour devenir
souffleur de verre ou joueur de biniou, accessoirement cyclo-pédaleur. Ce
village au si poétique nom est situé en plein Cymru, ce pays au-delà des mers
qu’on atteint par des trains permettant tous l’embarquement du vélo, du rapide
au tortillard. C’est dire combien ce pays est exotique (pour ne pas dire
rétrograde), comparé à la tendance européo-continentale de tourner le dos à
notre moyen de locomotion préféré.
Cymru,
république bananière ? Moutonnière tout au plus, des brebis galloisées sans
nul doute, qui n’arrêtent pas de zig-zaguer sur les routes pentues ( 1 in 4,
autrement dit un sympathique 25 %) au passage de l’extra-terrestre à vélo. Le
jeu consistant, pour l’E.T. de service, d’éviter ces quilles ambulantes. Mais
pourquoi tant de laine ?
Le Pays de
Galles, se cachant sous ce nom de Cymru n’a, sur bien des plans, pas
grand-chose à voir avec l’Angleterre : véritables montagnes s’élançant du
niveau de la mer jusqu’à 1 000 m, avec des petits trains à la suisse
s’accrochant à leurs flancs, vastes horizons occupés principalement par les
moutons, et tous les panneaux écrits en gallois, obligeamment traduits en
dessous dans la langue de Salman Rushdie. Mais c’est bien la Grande Bretagne,
avec ses petites maisons alignées avec renflements côté rue, ses pubs, ses
châteaux-forts ressemblants à s’y méprendre aux jouets pour enfants - à croire
que ces derniers ont servi de modèles aux premiers.
C’est aussi
l’Angleterre par le trafic sur les routes, de voitures dont on se demande où
elles vont, vu la relative faible densité de population. Il doit y avoir un
autre tunnel par là-bas, avec un spoil-shuttle qui doit se charger d’éliminer
se surplus de cargaison malodorante et bruyante à quatre pattes.
C’est aussi le
fameux humour britiche, dont chaque citoyen insulaire semble posséder le
secret dans l’éclat malicieux de leur sourire, et le sourire raffiné dont ils
font honneur au voyageur, et aux autres aussi je présume. Il doit y avoir du
J.B. Shaw ou du J.K. Jérome dans chacun des sujets de Sa Majesté, que nous
autres pauvres franchouillards n’arriveront jamais à imiter que par de pâles
copies bébèteshotesques et applauditiques au rabais (quoique les Guignols et
autres Nuls, c’est pas mal non plus). Allons, la Dame de Fer n’a pas su venir
au bout de ce tréfonds de manque de performance et de compétitivité !
Le printemps (mai-juin)
est sans doute la meilleure période pour parcourir cette annexe verdoyante de
l’Arms Park : des températures acceptables, et un peu moins de pluie que le
reste de l’année. Et la proportion de toilettes publiques (dans le moindre
village), de tables de bois avec bancs, de gazon fraîchement coupé par les
moutons (ou la tondeuse, allez savoir), apte à une sieste réparatrice font de
ce recoin un plaisir à parcourir à vélo.
Depuis
Londres, vous vous y rendrez par la gare de Paddington pour Cardiff-Fishguard,
ou celle d’Euston pour Crewe (sur la ligne de Liverpool) pour prendre un
tortillard vers Chester-Holyhead, le vélo dans le même train naturellement. Un
coup/coût de 1 200 FF AR depuis Paris, si vous avez pris soin de prendre un
billet “Discovery” (= Joker) entre Paris et Londres 15 jours avant,
éventuellement un tarif Apex en Grande-Bretagne sur un aller-retour déterminé
au moins une semaine avant.
Et pour ceux
qui ont du temps devant eux, il y a même la possibilité de gagner d’Irlande,
soit depuis le nord-est (Holyhead, directement sur Dublin/Dun Laoghaire), soit
depuis le sud-ouest (Fishguard, sur la Pembrokshire Coast, vers Rosslare) par
de nombreux ferries journaliers. Si vous passez 3 semaines en Irlande, il peut
être une bonne idée de parcourir 1 semaine ou 2 le Pays de Galles...
Frédérick FERCHAUX, 1995