ZUMOUR RECALE
J'ai réuni ici un certain nombre de textes (se voulant) humoristiques
LA VISITE DES
GROTTES
Vous avez
parfaitement en mémoire une de ces expériences au fin fond de la Terre, dans
l'un de ces parcs d'attractions du Massif Centro-Jurassien. Par la magie d'un
tourniquet made in RATP, vous voilà plongé dans le noir, trébuchant sur un sol
incertain (il vous revient alors en tête le mot "gouffre"), vous cognant les
épaules sur les aspérités qui viennent à votre rencontre. Ça ruisselle de
partout d'une eau probablement douteuse, vous manquez parfois de déraper sur un
sol devenu glissant, ou de vous écrabouiller la tête sur un plafond en dents de
scie.
Ça fait déjà cinq
bonnes minutes d'éternité (soit trente pour votre horloge interne) que vous
crapahutez dans cet infâme boyau visqueux, le précieux ticket de caisse n° 06817
en main (le n° 01000 a été délivré ce matin-même, à l'ouverture), avec ce môme
devant vous se retournant toutes les trente secondes pour vous faire "panpan
t'es mort" avec le pistolaser de la dernière série japoniaise, et que vous
trouvez que huit résurrections successives, ça fait beaucoup pour un seul homme.
Là, sur votre
gauche, une pancarte néanderthalesque vous signale une splendide concrétion
rocheuse. Elle aurait été plus splendide encore, si l'ampoule censée la mettre
en valeur n'avait claqué - depuis quelque temps déjà, si vous en jugez à la
toile d'araignée tissée autour. A quelque chose malheur est bon : ça vous a
épargné d'étaler à votre compagne du moment votre emmêlement de crayons entre
les stalag-tites/mites, dont vous n'êtes jamais arrivé à vous fixer celles qui
vont de bas en haut ou de haut en bas, avec la mention "fragile" apposée dessus.
A droite, le Grand
Lac. Vu les dimensions de la nappe, vous comprenez sans peine comment vous avez
loupé le Petit Lac - ou bien s'agissait-il de cette flaque boueuse sur laquelle
vous avez glissé tout à l'heure ? Sur ses rives, chacun s'époumonne à des effets
d'écho, à en décrocher le plafond. Vous essayeriez alors plutôt une déclamation
du genre "O lac, accélère ton vol !", car vous vous rappelez subitement que vous
avez une tendance à la claustrophobie, que seul votre indomptable courage à
écumer tous les sites touristiques indiqués par votre Guide Jaune vous a fait
jusqu'alors surmonter. Surtout que là, il s'agissait d'un ***.
En amont, un
embouteillage. Probablement un frère de galère qui vient de perdre une
espadrille, et tous ses voisins en train de piétiner sur place à la recherche de
la pièce manquante. Et les autres claustros derrrière qui poussent, vociférant
des "mais avancez, nom d'un chien !", et vous vous dites que le métro aux heures
de pointe, c'est pas si mal, finalement.
Enfin la sortie !
Sur votre gauche, le temps de reformater vos pupilles à l'agressive et
dispendieuse lumière naturelle, vous repérez quelques Allemands plongés dans
leur Reisefürher, qui semblent avoir échappé à ce cauchemar, vu leur mine
épanouie. Patience.
Sournoisement, vous
lancez, dans votre délicieux anglais à couper un rosbif au couteau, un
"merveilleux, n'est-ce-pas ?" Devant les yeux ronds du quatuor, vous poursuivez
votre avantage : "ne me dites pas que vous avez raté le Couloir du Diable (1) ?"
Vous avez gagné. Magnanimement, vous indiquez, avec forces détails, d'après le
plan (excellent) de leur Reisefürher, comment accéder à l'entrée. Vous
jaugez avec suavité le classique amateur de bière du groupe : en voilà un qui
devrait bien rester coincé trois bonnes journées, avant que les pompiers du
bourg voisin ne se décident à venir le libérer...
(1) Devil's
Corridor, pour nos lecteurs d'Outre-Tunnel.
Frédérick
FERCHAUX, 1996
LA VISITE DES
MUSEES
Non, vraiment, les
musées n'ont jamais été votre fort. Pourtant, plus d'une fois vous êtes entré
dans l'un de ces temples du Savoir et de l'Art, visant l'étroit créneau horaire
d'ouverture, similaire à celui d'un retour de capsule vers la Terre. Armé de
votre soif de Connaissance et de Culture, vous vous êtes jeté avec concupiscence
sur ces vitrines exhibant les charmes d'un autre âge.
A la quatrième salle
de poteries, le charme semble usé. Jusqu'ici, vous vous attachiez à admirer
chacun de ces Chefs d'Oeuvre (l'équivalent des Arcopal et cuillères Inox de
notre époque), vous arrachant les yeux sur les notices explicatives ô combien
techniques vous révélant que ces pots sont en terre, et qu'ils contenaient de
l'eau / de l'huile / du sel. Maintenant, les pieds en feu, vous resteriez bien
assis, à vous taper vulgairement une grille de mots croisés force 2, au beau
milieu du Temple - vous n'en admirez que plus de bâilleur de service qui n'a
même pas ce droit.
La côte de
saturation est atteinte, ce fatras de terre glaise à moitié esquintée ne vous
inspire plus qu'un profond ennui ; surtout si la notice explicative vous annonce
"notez l'évolution artistique", et que vous n'avez noté rien d'autre que votre
visible insensibilité à l'Art de l'époque.
La salle suivante
vous ramène un peu d'espoir : une foule compacte se masse devant une vitrine
centrale. Sûrement une touffe de cheveux de Cléopâtre, la pièce maîtresse du
musée, passée au Carbone 14 et tout ça. Le nez n'est pas exposé à côté, ç'eût
rendu ce musée encore plus célèbre.
Ouf, enfin le Trésor
: de magnifiques pièces d'orfèvrerie, ainsi que le suggère habilement le nom de
la salle. Mais vous n'avez rien compris : il s'agit avant tout d'or, ce métal si
précieux qu'on se demande si en posséder ne pourrait pas dispenser de ces choses
superflues que sont l'alimentation, le sommeil... Et vous, vous restez
benoîtement à admirer la finesse du travail de l'artiste, sûrement un copain de
celui des poteries de tantôt. Vous êtes tellement connaisseur, qu'on vous
mettrait une feuille d'emballage de chocolat que ça vous ferait pareil. De l'or,
rendez-vous compte ! Vous m'en mettrez trois kilos, ma bonne dame, c'est pour
offrir.
Ouf, vous voilà
sauvé : une maquette, reproduction d'un camp romain. Manquent plus que quelques
aiguillages, une gare à l'échelle HO et le TGV miniature klaxonnant bravement
sur les circonvallations. Là, ça vous parle ! Du reste, on se demande pourquoi
l'on ne se contente pas de visiter les maquettes. Quand vous épluchez la
généreuse documentation de l'office de tourisme local, vous voyez d'alléchants
plans de sites archéologiques qui vous promettent plein de théâtres, de bains et
d'allées en colonnades ; sur le lieu, même le plan ne vous aide guère à deviner
que cet agrégat de pierres et de colonnes brisées a pu constituer un colossal
Colisée ; et le stade dont les blocs disjoints disparaissent sous
l'herbe sauvage ne vous évoque pas vraiment le temps de sa splendeur. Vous vous
dites que ce n'est plus à l'imagination qu'il faut recourir, mais carrément à
l'abstraction pure, et regrettez que votre cerveau ne soit pas équipé de la
dernière version de RAO (Reconstitution Assistée par Ordinateur).
Fin des visites avec
la frustration de rester ignare devant cet étalage de Culture. Vous vous êtes
dit : "je vais investir dans un bon guide précis". Vous vous apercevez alors que
vous avez le nez sans cesse dedans, oubliant du coup de regarder les pièces
présentées, devenues un peu accessoires ; ou que l'ordre, la numérotation et le
contenu des salles ont été modifiés, vous faisant tourner comme un écureuil dans
le bâtiment - même les toilettes ont changé de place, un espace cafétéria ayant
été ouvert depuis.
Cette fois, vous
avez opté pour la version hard : le guide. Pas celui attendant le chaland (vous)
à l'entrée, mais celui des autres. Les investissements lourds, c'est terminé.
Vous visez un groupe d'Italiens. Il y aura bientôt, dans nos magnifiques
monuments historiques turcs, plus d'Italiens que de Japonais. Il se trouve que
vous comprenez l'italien, sœur latine si proche du français - à croire qu'ils
nous ont copié. Vous ajoutez selon le cas un a, un o ou un i, et voilà le
travail.
Vous vous rendez
vite compte qu'il faut sans doute ajouter quelques syllabes supplémentaires, et
supprimer quelques consonnes superflues. Les mots commencent à se bousculer au
portillon, et vous êtes parvenu à grande peine à décoder la première phrase
émise par le signore - en fait, celle qui correspond à l'intitulé de la
salle, gavé d'anecdotes savoureuses. Quelle idée, aussi, de prononcer avec cet
accent italien...
Alors, vous vous
rabattez sur le troupeau de Français que vous voyez poudroir de la salle
précédente. Afin de ne pas être démasqué par vos compatriotes comme vulgaire
pique-guide, vous tendez ostensiblement le museau en direction des recoins de la
pièce, poussant de temps à autre un "schön ! wunderbar !". Ce
faisant, vous ne perdez pas une miette des explications de Professeur Guide.
Impressionnant de
Savoir ! Vous en apprenez, des choses ! Vous apprenez surtout que vous ne savez
rien, et si par hasard à la sortie du musée, un examinateur avait le malheur de
vous soumettre à une interro surprise, le résultat ne serait pas brillant. Entre
les Mamelouks, les Hottites et les Canines (ou bien était-ce les Canaries ?), la
sauvegarde commence à se mélanger, vous ne savez plus qui a envahi qui. Vous
avez retenu toutefois que nos bons Croisés à nous étaient allés faire une visite
de courtoisie dans les parages à coups de bombardes, et ça, c'est l'essentiel.
Frédérick FERCHAUX 1996
UNE SOLUTION POUR LES AEROPORTS ENCOMBRES
Le gonflement exponentiel du trafic aérien pose un problème : les aéroports situés près des villes, prévus à l’époque pour un trafic de faible volume, sont souvent saturés, ce qui conduit les pouvoirs publics à la construction de nouveaux aéroports, plus adaptés aux trafics d’aujourd’hui...et de demain.
Le problème est que les villes concernées sont généralement de grandes villes, qui se sont développées de façon souvent exponentielle aussi, avec une forte densité de population. Ce qui conduit à chercher des zones aéroportuaires de plus en plus loin des centres urbains. Prenons Paris, qui a eu son premier aéroport au Bourget (6 km des portes de Paris), puis Orly (10 km), puis Roissy (19 km), et maintenant l’on parle de Chartres ou Beauvais, à 80 km !
Ce phénomène risque de rendre parfois l’avion moins attractif : aujourd’hui, il est bien plus rapide de se rendre de Paris à Lyon par TGV, et cela pourrait devenir le cas pour des destinations plus lointaines, voire européennes si les lignes grande vitesse se développaient. L’idée cauchemardesque de moyens de transports plus économiques en combustibles, et moins polluants (horreur suprême), oblige à une réflexion d’urgence.
Il fallait donc trouver une solution pour remédier à ce problème. Les pouvoirs publics ont enfin trouvé : construire des aéroports souterrains. Il suffisait d’y penser. Avantages :
- ces aéroports pourront être construits sous le centre ville même.
- ils pourront être en correspondance directe, pour ainsi dire quai à quai, avec les réseaux de transports publics urbains : métro, RER, U ou S Bahn, Subway...Dans le cas de Paris, une carte Azur est à l’étude, basée sur le modèle de la carte Orange, avec des zones (32524, pour être précis), qui permettrait de voyager de St Cloud ou Neuilly à Manhattan. Bien sûr, cette carte ne serait que d’une faible utilité pour les pèquenots arrièrés qui s’obstineraient à habiter à La Courneuve pour travailler à Flins ou pointer à l’ANPE locale, et qui n’ont pas encore compris les bienfaits du village mondial. Restons entre gens modernes et évolués (et accessoirement disposant de la carte American Express - ne partez pas sans elle).
- les pistes, souterraines, ne seront plus soumises aux intempéries : pluie, brouillard, verglas, et seront donc disponibles à tout moment.
- à quand une rame de métro parisien atterrissant directement dans la City de Londres ou Downtown Los Angeles ? Bientôt, certainement.
Les pouvoirs publics ont cependant annoncé qu’il restait un modeste détail à rêgler : comment décoller, et a fortiori atterrir sur des pistes souterraines en plein centre ville. Vraiment une futilité, qui nous confirme dans l’idée que le projet est pratiquement finalisé, il semble qu'on voit le bout du tunnel. Il est vrai qu'à une époque, on craignait que ce projet ne soit enterré...
Frédérick FERCHAUX 2000
CHIENNE DE
VIE !
Ah, ces chiens ! Le
meilleur ami du cyclo, rien de moins sûr. De son maître, ça oui, celui-ci
serait-il le plus grand criminel que la terre ait porté. Un chien, c’est pas
fait pour juger, c’est fait pour mordre, alarme-ç...Le cyclo joue au slalom
entre les meutes des chiens, dits de garde. Gardes-fous ? Voici donc les
diverses conduites que vous pouvez tenir :
1- Laissez vous mordre
gentiment un mollet, il vous en restera toujours un autre. J’en connais même qui
tendent l’autre mollet. Indiqué pour les adeptes de la religion du Chien-Dieu.
2- Sortez le fusil à
canon scié que vous avez toujours à portée de main, dans la sacoche avant droite
(pour les droitiers), à la manière de Steve McQueen. Aux contrôles d’aéroport,
vous aurez eu soin de le faire passer pour une inoffensive canne à pêche d’un
nouveau genre. Dites que vous vous en servez si ça mord ! Mais prenez garde de
ne pas appuyer alors sur le chien...
3- Stockez les petits
cailloux, tel le Petit Poucet. Mais non, pas les miettes de pain ! D’aucuns
tablent sur l’intelligence (ah ?) du meilleur ami de l’homme, se contentant d’en
entrechoquer deux (deux cailloux, pas deux chiens. Cela dit, vous pouvez tout
aussi bien essayer), histoire de leur faire comprendre qu’au cas où l’on loupe
le premier tir, on dispose d’une seconde frappe. Ouais. Dans ce domaine-là, je
ne sais pas si les sommations sont bien utiles, ni même recommandées.
4- Apprendre le langage
du chien, pour lui faire comprendre que vous êtes de son côté. Ainsi, “moi ami”
se dit “ouah, ouah ouah!”. Attention cependant à l’accent tonique, qui tel le
gin peut changer tout le sens. Enfin, on risque de tomber sur un élément ne
connaissant qu’un dialecte local (style chinouah, ouahterlo, samouah...). Il
faudrait favoriser la pratique de l’esperanto canin, afin de briser les
barrières de l’incompréhension.
5- Pour les spécialistes
des arts martiaux, le cri qui tue. Méfiance : kiaï est assez proche de kaï kaï.
Le chien peut vous prendre pour un congénère peureux, et n’en trouver que plus
de joie à vous poursuivre.
6- Ayez toujours sur
vous une boite de patée McOnry, avec l’espoir qu’il reconnaisse la voix de son
maitre, citoyen électeur. Peut-être cela le fera s’abstenir.
7- Si, à la longue, vous
vous mettez involontairement à répondre aux aboiements par d’autres aboiements,
ne vous inquiétez pas : dans votre petite tente, ne dormez-vous pas fréquemment
en chien de fusil ?
8- Il n’y a bien qu’un
endroit en France, où les chiens devraient vous laisser en paix. C’est dans le
Var, à Fayence bien sûr...
Dédié à tous les Ran Tan
Plan de la Terre (et il y en a!).
Royal GAMIN
NOUVEAUTES
En exclusivité, les nouveautés du Salon du Cycle
2010 :
- Chambres à air à rustines pré-encollées. Finies,
les fastidieuses réparations, tube de dissolution entre les dents, décollant
précautionneusement la pièce de son support, un oeil sur le minuscule trou, dont
la découverte a nécessité l’apport d’une bassine, modèle potion magique (XXL).
- Moulin à café intégré à la roue-libre : il suffit
de pédaler, et on produit ainsi un délicieux café moulu, qu’on mélangera au
contenu de la bouteille isotherme. Bien veiller à ce qu’aucune goutte d’huile de
la chaîne ne pénêtre dans le moulin.
- Pompe double sens : expirante pour gonfler le
vélo, et aspirante pour nettoyer la tente, le vélo...
- Pratique, pour la traversée des déserts : de l’eau
en poudre. Contient les minéraux essentiels. Il suffit d’ajouter la quantité
désirée de H2O, et nous obtenons une eau d’une grande pureté, cela
coule de source.
- Pot de yaourt blindé, évitant le classique écrasement sous l’appareil photo. En option : chalumeau, au cas où on aurait perdu la clé du pot (ce qui serait un manque de chance).
- Pratique pour la traversée des villes : le bol
d’air pur. Attention cependant: le contenu se détériore rapidement, à moins de
garder l’individu au frais.
- Sacoches équipées de flotteurs gonflables (avec la
pompe ci-dessus) : pour traverser les rivières, occasionnellement les océans.
Avantage supplémentaire : suivant la pression, les sacoches seront plus légères
à transporter. Il suffit de veiller à ne pas manquer d’air (voir "bol d'air
pur").
- Selle transformable en chaise longue, pour la
sieste. Peut à l’occasion servir de chambre d’ami, en voyage.
ARRETEZ DE
L’Académie du Vélo a
enfin pris une décision réclamée depuis longtemps : la suppression de cet
article tant décriée, à savoir la pédale. En effet, ces derniers temps, de
nombreuses pétitions circulaient sur nos bandes cyclables, mettant en évidence
le caractère nuisible de ces instruments contondants ; non seulement les
malheureux cyclistes étaient contraints d’appuyer dessus à intervalles réguliers
et rapprochés, mais, de plus, ces instruments de torture devenaient des armes de
première frappe pour les fragiles mollets, en cas de poussage de la bicyclette
sur des sentiers de montagne (où la pratique du vélo va de soi).
Cette décision a été
prise à la majorité. Cependant, des avis contraires ont été émis : notamment,
que sans pédale, il deviendrait plus difficile de faire avancer une bicyclette.
Devant l’apparente pertinence de ces propos, l’Académie a décidé d’inscrire
cette question au prochain ordre du jour. Dans les milieux auto-risés, on
n’exclue pas la possibilité d’un pédalage manuel, afin de laisser aux pieds le
temps de penser un peu, et surtout de se faire une belle jambe.
CEIVELOMATIX
MAIS OU S'ARRETERA DONC LE PROGRES ?
ET POURQUOI ?
ET COMMENT VA LE PETIT
DERNIER ?
Il y a déjà deux
décennies, est apparu dans le monde des loisirs un mode révolutionnaire de
transport : le VTT. Puis, il y a, à vue de louche, une décennie, fut lancé un
nouveau mode de transport révolutionnaire, le VTC, qu'on aurait pu aussi appeler
le VTT (Vélo Tout Trottoir). Vous rendez-vous seulement compte, un vélo qui
permettait de rouler même en ville ? L'aspect authentiquement révolutionnaire de
la chose ne vous aura nullement échappé. Enfin, j'espère.
Mais voici que, sur le
marché décidément devenu porteur du deux-roues non motorisé, va enfin apparaître
le mode de transport qui, je le crains, va faire plus fort que l'invention de
l'imprimerie, de la poudre et des cornets de glace à la pistache réunies : le
VTB, c'est-à-dire le Vélo Tout Bitume.
Je vous explique, car la
lenteur de vos neurones ne vous aura pas permis de percuter du premier coup
(tout le monde ne s'appelle pas Jean-Louis Debré). Une bicyclette qui permet de
rouler sur route revêtue. Incroyable, non ? Puisque l'objectif de notre
association est de vulgariser auprès d'un large public la création en pleine
élaboration dans les chaudrons de l'avenir (ou quelque chose comme cela. Mais
qu'est-ce que j'ai bien pu vouloir dire ?), nous allons décoder pour vous en
direct.
Décrivons l'engin de ce
futur proche, digne du cinquième millénaire : sa progression sur la bande
bitumée se ferait au moyen de deux lamelles métalliques (dénommées, dans le
jargon des spécialistes, "jantes". Pardonnez-nous pour l'emploi des termes
savants qui vont suivre). Ces bandes métalliques, répondant à l'équation pi r2,
auront le contact facilité avec le sol grâce à des bandes gommées ("pneus"),
contenant une masse d'air prise dans une enceinte caoutchoutée ("chambre à air".
On s'enfonce dans le langage ésotérique).
La direction de ce
véhicule révolutionnaire se ferait grâce à un système de pilotage
particulièrement ingénieux : une barre métallique horizontale, perpendiculaire à
l'axe de direction du prototype ("guidon". Où vont-ils chercher ces noms ?). La
motricité serait assurée par un incroyable système, d'une rare complexité, que
nous nous refusons à décrire ici, tant cela nécessiterait des développements
("manivelle", "pédales", "axes" : rien que ces termes, d'une rude rigueur
scientifique, effrairaient le néophyte peu versé dans la cyber-science). Des
membres de la hélas renommée secte des cyclocampeurs ("Cyclo Camping
International") auraient même équipé de tels prototypes de grillages
métalliques appelé "porte-bagages". Quelle idée. Comme si les bagages ne
pouvaient pas tenir dans le véhicule d'assistance que suit tout cycliste un tant
soit peu raisonnable.
Bon, arrêtons-là l'avalanche de descriptions absconses. Vous l'avez compris, il s'agit d'un bond technologique, qui va reléguer le VTT et le VTC dans le rayon de l'ère vélolithique. Les cyclistes pourront désormais rouler sur la route, chose qui était évidemment complètement impossible avec les modèles de vélo dépassés. Si Cent Saint Quentebé savait ça ...!
CONFRERIE
DU TOUR DU MONDE A BICYCLETTE
Depuis la petite promenade de santé de Manon Hervé (qui a
entraîné dans son sillage ses parents, dès huit ans avant sa naissance : assez
exceptionnel, non ?), de nombreux cyclos vont se lancer dans l'aventure d'un
Tour du Monde.
Aussi nous devons-nous de créer une Confrérie du Tour du Monde à
Bicyclette (CTMB - non, ce n'est pas le nom d'une compagnie ferroviaire suisse)
avec son palmarès, son règlement et ses médailles. Ceci, afin de normaliser
enfin cette activité, laissée actuellement irraisonnablement au libre arbitre de
chacun, n'importe qui pouvant prétendre avoir fait un Tour du Monde à vélo (Joël
Lodé, Alain Guigny, Bernard Magnouloux, les Hervé...n'importe qui, vous dis-je
!)
Il nous paraît donc qu'il faille souscrire désormais aux
critères suivants, avec preuves à l'appui (tampons officiels, photos,
témoignages écrits, articles de presse, passage sur CNN ou à défaut dans le 20
heures de France 2...).
- Avoir parcouru au moins 40 000 km, ceci représentant la
circonférence de la Terre au niveau de l'équateur.
- Avoir roulé sur les six continents, l'Amérique étant
divisée en deux parties (Nord et sud).
- Avoir fait la cueillette de fruits dans un pays méditerranéen
ou (au choix) en Australie/Nouvelle Zélande.
- Avoir fait un travail de force ou abrutissant (chantier,
plonge...) dans un pays d'Amérique ou d'Asie - la pratique du vélo, bien que
correspondant totalement à la définition de ce critère, n'entre pas en ligne de
compte.
- Avoir connu un problème sérieux pour l'embarquement du vélo
dans un avion (refus, surtaxe importante, dégâts à l'arrivée...). Pour la
réalisation de ce critère, l'Aéroflot sera conseillée.
- Avoir connu une rétention d'au moins une nuit à une
frontière (ou deux, si frontières centro-américaines)
- S'être fait renvoyer à la capitale d'un pays africain, pour
non-conformité grave d'un document (tampon très légèrement imparfait, absence de
la vaccination antivariolique - pandémie éradiquée depuis 20 ans au moins).
- S'être fait subtiliser son appareil photo (la perte du zoom
ou du pied n'est pas obligatoire, mais constituera un plus indéniable) dans un
pays d'Asie. Le choix est laissé entre le Proche-Orient et l'Extrême-Orient.
- Avoir attrapé un petit palu, le continent étant laissé à la
discrétion du récipiendaire - mais avouons que le contracter aux USA ou en
Europe serait indiscutablement un must.
- Avoir été affecté d'une splendide amibiase ayant laissé
sans forces au moins un mois.
- S'être fait renverser par un véhicule, au Brésil ou au
Mexique ou autre pays du même genre (si camion, bonus).
- Avoir subi une attaque à main armée dans un pays d'Amérique
Latine.
- Avoir connu les geôles d'un pays en guerre civile (ce qui
suppose que votre itinéraire prévoit expressément de passer par un de ces pays -
mais ça ne devrait pas être bien difficile...), ou pour trafic de drogue (de
préférence, avoir été suspecté à tort).
- S'être fait rouler comme un bleu en changeant des dollars
dans une rue est - européenne.
Les documents attestant de ces faits devront parvenir avec la
demande du titre officiel de Tour du Monde à Bicyclette, et ce pour le 1e Avril
de l'année. Cette demande sera accompagnée du règlement, en monnaie de Saint Jeu
(principauté italo-ibérique bien connue), adressée à la Confrérie (siège : Mont
Mary).
Après vérification minutieuse des preuves (nous disposons d'une
machine à détecter les faux), l'impétrant recevra un superbe diplôme, attestant
de la véracité du TMB, ainsi qu'une médaille réalisée par Sho-ko-La, un
anachorète (c'est un gros mot) vivant sur un col tibétain. Très originale, cette
médaille aura la forme de la Terre, symbolisant une roue de vélo (Dieu, vulgaire
copieur, s'en est sûrement inspiré pour créer les étoiles et les planêtes).
Toute demande non accompagnée de toutes les preuves sera
irrecevable : un Tour du Monde à Bicyclette sans l'ensemble de ces ingrédients
serait sensément inimaginable.
Le bureau de la Confrérie du Tour du Monde à Bicyclette
Siège, Mont Mary.
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