POUR LA VOITURE PAS CHERE !

 

 

La circulation automobile est en train de ravager notre planète, tant par la pollution (et les maladies) qu’elle suscite, que par son importante contribution à l’effet de serre – sans parler du gaspillage d’une matière première dont on découvrira peut-être la nécessité pour d’autres utilisations, comme c’est déjà le cas pour les plastiques. Sauf qu'une fois tout le pétrole bêtement brûlé...

 

Pour autant, il apparaît difficile de revenir au bon vieux temps des diligences : moyen de liberté, souvent devenu moyen nécessaire de locomotion pour des foyers qui, par souci de tranquillité et/ou de coût, et devant la démission des pouvoirs publics de très nombreux pays (sauf ceux de culture germaine / nordique), ont fini par habiter dans des zones peu densément peuplées, éloignées des principaux centres d’emploi comme de loisirs ou utilitaires. Quand ce ne sont pas ceux-ci (hypermarchés) qui se sont eux-mêmes éloignés des centres. A noter cependant que les hypermarchés chinois sont bâtis dans les centre-ville, et ont toujours un parking à vélo important... Tout le monde n'est pas aussi stupide que les Américains, et certains peuples européens qui les singent.

 

Il existe des utilisations pour lesquelles il restera difficile de décourager l’utilisation d’un transport motorisé individuel : les déplacements dans les zones rurales, les week-ends et congés annuels. Les transports en commun offriront toujours difficilement une offre adaptée  dans les zones peu densément peuplées, et resteront assez inconfortables pour une famille armée de nombreux bagages, et désireuse de voyager « open ».

 

Par contre, il est un domaine où les déplacements individuels sont grandement évitables : ceux domicile-travail, et une bonne partie des déplacements utilitaires / loisirs dans les grandes agglomérations (courses, dentiste, activités culturelles et sportives). De plus, ils constituent l'essentiel de ces déplacements, au bas mot 80 %.

 

Localement, les décideurs publics commencent, tant au niveau des régions et des départements que des agglomérations, à étendre l’offre de transports publics (tandis que l'Etat s'est lâchement défaussé, par exemple en revenant sur la décision d'affecter le produit des privatisations d'autoroutes aux transports en commun comme il était convenu). Hélas, dans les conditions actuelles, il ne suffit pas toujours de toujours mieux mailler le réseau, d’en augmenter la cadence, le confort, la rapidité et la fiabilité, pour voir masse de gens se détourner de leur moyen individuel de transport. On en vient à créer des lignes de bus avec, dedans, parfois guère plus de voyageurs qu’un véhicule en co-voiturage, pour une consommation supérieure en essence, un comble.

 

En fait, l’offre ne suffit pas. Il est nécessaire de « doper » la demande. Comment pense le quidam moyen qui veut se rendre au travail ? Son véhicule lui permet de partir au moment qu’il choisit, avec une durée souvent plus courte que par des transports en commun, en n’ayant de plus jamais à changer en cours de route. Sur ces points, les modes collectifs peuvent se montrer plus concurrentiels, pour peu que la fréquentation augmente fortement.

 

Mais fondamentalement, quel est le "moteur" ? J’ai acheté une voiture assez cher, sans compter l’assurance etc, si je ne l’utilise que pour les vacances, je ne suis pas près de l’amortir ! Donc, utilisation à toutes les sauces : pour aller au travail bien sûr, mais aussi bien pour faire les 300 m qui le sépare du bureau de tabac (quoi que, dans ce dernier cas, il s’agisse autant de flemme).

 

En fait, il faut rendre d’utilisation de la voiture individuelle le moins utile possible… en facilitant son achat ! Cela peut paraître contradictoire, mais une fois que chaque individu aura une voiture, à un prix dérisoire (bon, quand même pas offerte dans pif gadget), il ne trouvera pas nécessaire de l’utiliser à chaque fois. Cela pourrait être selon un système dégressif : la première voiture du ménage particulièrement pas chère (le prix d'une voiture indienne !), la deuxième un peu plus chère, puis la troisième et plus (si les enfants vivent encore sous le toit familial) encore plus chère. C’est par contre le carburant qui, lui, doit être horriblement cher (au moins 3 fois plus qu'aujourd'hui).

 

Ainsi, les gens n’utiliseront leur voiture que quand cela leur est particulièrement nécessaire (en week end ou en vacances, avec toute la famille, pour transporter des objets lourds ou volumineux, etc.), et le reste du temps, se rabattraient sur des solutions publiques, quand elles existent. En complément, tout doit être fait dans les villes pour décourager l’utilisation de la voiture. Pas de grands boulevards, un max de feux (mais priorité feux pour les transports collectifs), parking difficile dans les zones commerciales, etc., mais d’une manière bien plus systématique qu’aujourd’hui.

 

Le surcoût du carburant financerait aussi bien la baisse de prix des voitures, et les transports en commun. Un système de remboursement essence serait créé pour les gens habitant loin de tout transport en commun pratique hors agglos au sens large (style un bus le matin, un bus le soir, voire pas de bus du tout – mais là encore, des systèmes de transports collectifs à la demande, comme il en existe déjà, sont à développer), ou ceux pour lesquels leur profession les oblige à recourir à leur véhicule individuelle, selon une liste déterminée à l’avance.

 

L’afflux à attendre à l’encontre de la fréquentation des transports en commun permettrait enfin de développer ceux-ci, à un niveau encore inconnu en France (sauf, en partie, en région parisienne). Bien sûr, les tramways, les « S-Bahn » (trains de banlieue allemands-suisses-autrichiens, style RER), mais il faut aller plus loin.

 

Exemple, les bus. Ceux-ci font du cabotage intégral, desservant TOUS les arrêts, distants parfois de 300 m, sur des lignes pouvant faire, dans certaines agglomérations, plus de 10 km. Ce qui fait des parcours durant parfois plus d’une heure, quand avec une voiture on mettrait 20-25 mn. Pour ma part, pour me rendre de mon domicile à mon boulot, il me faut 45 mn à vélo à rythme pépère, et au minimum 75 mn par bus, avec pourtant une très bonne ligne (selon les critères actuels) en site propre sur les 2/3 du parcours (à une époque, elle avait même priorité aux feux).

 

 Il faut créer des lignes express, au sein même d’une ville (ça existe parfois pour rallier la lointaine périphérie, exemple de l’agglo Grenoble), avec desserte de quartiers lointains, puis, vers 4-5 km du centre, desserte uniquement des grands points d’arrêt.

 

Il existerait un système de correspondances entre bus express et bus tous arrêts d’une même ligne, sur le modèle de la desserte de la banlieue parisienne. Exemple : train omnibus desservant de St Lazare : Pont Cardinet, Levallois, Asnières, Bécon, puis train direct St Lazare-Bécon (relevant la correspondance du train omnibus à Bécon) et omnibus La Garenne jusqu’à Nanterre, et enfin troisième faisceau de trains, directs St Lazare-Nanterre (relevant etc.), omnibus ensuite.

 

Rien n’empêche de songer à un système de 3 faisceaux (ou plus…) dans les plus grandes agglos françaises. En fait, ce serait même mieux que le tram. Celui-ci, pour une série de raisons (pas de dédoublement des rails, sécurité…) sont quasiment obligés de s’arrêter à toutes les stations, distantes de rarement plus de 500 m, plutôt 400 pour contenter tout le monde. Il s’en suit que les tramways ont des vitesses commerciales guère supérieures à des lignes de bus en site propre, soit autour de 20 km/h. Des lignes de bus express, sans arrêt (sauf gros nœuds de correspondance) sur 3 à 5 km, gagneraient 10 mn (15 dans les meilleurs cas) de temps de parcours, et pourraient même dépasser 25 km/h.

 

On en finirait ainsi avec ce regard dédaigneux à l’encontre des transports en commun, jugés comme tout juste bon pour les miséreux qui n’ont pas les moyens de se payer une bagnole, signe extérieur de réussite pour tout individu d’aujourd’hui (attitude ringarde qui fera ricaner nos lointains descendants, mais nous n'en sommes pas encore là).

 

Certains diront : quelle horreur, c'est du collectivisme, atteinte à la liberté, etc. Sans doute, mais c'est exactement ce qui va se faire, y compris dans un système de "libertés individuelles", sauf qu'on aurait perdu vingt ans de plus. Vous savez déjà ce que je pense de notre système où tout le monde est libre... de crever du chômage, ou de soins trop chers, ou d'une éducation au rabais, ou... de l'effet de serre. La vraie liberté, c'est de se promener tout nu dans la rue (et d'autres choses moins avouables), sans compter que la liberté de l'un s'arrête là où commence celle de l'autre. Dès qu'il y a (heureusement) un système de contraintes sociales, parler de libertés individuelles (qui ne profitent réellement qu'à une minorité arrogante dont la liberté empiète largement sur celle des autres) est un abus de langage. Et inversement, parler de collectivisme toujours de manière péjorative relève d'un curieux sens des valeurs, puisque l'être humain vit  essentiellement en collectif. Mais comment peut-on être Persan ?