QUEL EST LE COL CYCLABLE LE PLUS ÉLEVÉ AU MONDE ?

 

 

Si l’on s’en tient aux indications officielles, ce serait le Khardung La, au Ladakh, en Inde. Ce col serait à 5602 m. En fait, tout me laisse penser que les Indiens ont un peu affabulé, pour pouvoir s’attribuer ce record à la Guinness. Le long de la route, il y a quelques indications altimétriques, apposées par le constructeur de la route… qui n’est jamais que l’armée indienne, dont je ne doute pas trop du souci de l’exactitude et de la précision. Toute base topographique de n’importe quel pays a commencé par les fameuses cartes d’Etat Major, à l’époque où disposer de cartes rigoureuses topographiques n’était pas vraiment destiné à ce que les cyclistes sachent à quelle altitude ils se trouvent.

 

Or, 3 km avant le col, il y a une telle indication, cohérente avec les indications précédentes depuis Leh. Je ne me souviens plus de l’altitude indiquée, mais elle était aux alentours de 5200 m. Depuis Leh, la montée est régulière, et en moyenne à 5,4 %, ce qui est du reste pas mal à cette altitude (on a l’impression physique du double !). Ce qui donne 150 à 180 m de plus jusqu’au col, soit entre 5350 et 5400 m. Des cyclos Anglais ont fait du reste la même observation générale, donnant 5400 m au Khardung La. Enfin, je me souviens avoir vu, sur une carte, une altitude de 5350 m. Dans tous les cas, il est parfaitement impossible que cette route passe, en 3 km, de 5200 m à 5600 m, soit 13% : ce type de pourcentage n’est déjà pas très commun sur les routes, peu fréquent sur une telle distance, et a fortiori sur une route à plus de 5000 m ! Personne ne pourrait grimper un tel % à cette altitude, sur le vélo. Or, je l’ai fait avec 3 « papys » de 60 ans, il est vrai à la forme physique et mentale impressionnante, qui m’ont même mis la pâtée entre nous soit dit, ils devaient tourner soit à l’EPO, soit au thé au beurre de yak salé, une version nettement plus hard (voyez les dégâts à haute dose chez Bush Jr et ses conseillers, c’est plus un trip, c’est du délire).

 

Récemment, sur une base cartographique et altimétrique mondiale pour GPS, j’ai visionné la zone (non, non, pas celle du cerveau de Bush Jr, c’est creux, plein de vide, de suffisance et d’insuffisance massive) : non seulement je n’ai pas trouvé un seul col à 5600 m au nord de Leh, mais il est même difficile de trouver un sommet à cette altitude ! Certes, ces bases cartographiques ne sont pas aussi exactes qu’on pourrait penser : j’ai pu parfois relever jusqu’à 50 m de différence entre les indications qu’elles donnent, et les indications « in vivo », ou bien en comparant avec des données altimétriques fiables. Mais bon, il ne s’agit que de 50 m.

 

Un autre col serait prétendant pour le titre, toujours au Ladakh, sur une piste récemment ouverte aux Etrangers, plus à l’est de Leh (Marsimik La). Mais même là, je doute qu’on dépasse les 5400 m. Il faut donc se rabattre sur le Tibet.

 

En Chine, et « donc » au Tibet, il est fort difficile d’obtenir des données fiables : les cartes topo sont absentes (en tout cas à la vente au grand public, et ma timidité naturelle m’a interdit jusqu’ici à aller rendre visite aux commandants de casernes pour consulter les emplacement de leurs bases de missiles), et dans certains coins (le Sichuan notamment), les autorités se laissent aller à des fantaisies, sans doute le vieux coup, comme pour le Khardung La, d’indiquer, en guise d’altitude réelle du col, celle d’un sommet proche, ce qui donne parfois un coup de pouce de 300 m, pour épater sur une carte de visite routière.

 

De nombreux cyclistes ont mis en ligne des tableaux d’itinéraires avec altitudes (Corax, Pedal Global…Ferchaux, mais lui aussi, désormais, il tourne au thé au beurre de yak salé, alors…), mais ces altitudes sont souvent le résultat d’altimètres personnels qui, même s’ils sont prévus jusqu’à 5000 ou 6000 m, finissent par devenir nettement moins précis à partir de 4000 m. Et puis, le reparamétrage régulier sur une altitude fiable étant difficile, au bout de quelques jours ou semaines, les indications de l’altimètre finissent par avoir une marge d’incertitude de 100, 200, voire 300 m. Un col mesuré à 5500 m peut n’en faire en fait que 5200 m, autant dire à peine plus haut que la plaine du Gange vers Kolkotta.

 

Il existe de nombreux cols cyclables à plus de 5000 m au Tibet – en fait, pratiquement sur tous les axes convergeant sur Lhasa, depuis l’ouest, le nord, l’est et le sud vers le Népal (sauf l’itinéraire Sichuan nord via Qamdo, qui n’atteint ridiculement que 4900 m). Par contre, très rares sont ceux qui dépassent les 5500 m. Selon Corax, il y en aurait un sur le plateau du Chang Tang, Lhasa-Ali (Kashgar) via Coqen (Tsochen), ce qui est fort peu douteux, vu que le plateau lui-même est le plus souvent pas très loin de 5000 m. On trouve effectivement, sur la piste entre Raka et Tsochen, le San Maberthen La, côté à 5813 m. Si cela était confirmé, ce devrait être le plus haut col routier au monde. Bien sûr, la zone est interdite aux étrangers. Mais si vous ne savez lire ni le chinois, ni le tibétain…

 

 

Bon, voyons si vous avez bien suivi le cours. Le col cyclable le plus élevé au monde est :

 

- le col de la Bonette, 2802 m (bande de tricheurs ! 2715 m pour le col lui-même), Alpes Maritimes, France

- le col Sommeiller, 2993 m, frontière Italie-France, accessible depuis Bardonecchia

- un col à 3100-3200 m, dont j’ai oublié le nom, au sud de Granada, en Espagne (goudronné au nord), qui ne saurait en tout cas être le col d’Europe le plus élevé, puisque la Bonette s’affirme comme l’étant.

- le Mostiquo Pass, 13186 feet (4030 m), Colorado, USA

- le Khardung La, 5602 m, Ladakh, Inde

- le col chique dans les prés, Lune, Espace

- le col honni de Vakanz (honni, car l’on n’est plus au nid)

- le col Ypaustal, entre Saverne et Wien, faut mettre le paquet pour se l’envoyer (réservé aux timbrés)

 

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